
Bivouac légal en France : où et comment dormir dehors
Où peut-on bivouaquer légalement en France ?
Dormir à la belle étoile, planter sa tente au cœur d’un paysage sauvage, voilà ce qui séduit tant de randonneurs. Mais en France, la pratique du bivouac n’est pas « libre » partout : elle est soumise à des règles, des réglementations locales, des zones protégées, et parfois à des interdictions strictes. Dans cet article, je vous propose de faire le tour des notions clés, de la législation nationale aux exceptions des parcs nationaux, pour que vous sachiez où bivouaquer légalement en France, et dans quelles conditions.
Comprendre la différence : bivouac vs camping sauvage
Avant tout, il faut bien dissocier deux notions souvent confondues : le bivouac et le camping sauvage. Le droit français tend à faire la distinction : le bivouac est plus souvent toléré sous conditions, alors que le camping sauvage est fréquemment interdit.
Le bivouac désigne une installation minimaliste, pour une seule nuit, au cours d’une randonnée, avec un équipement léger (tente compacte, tarp, sac de couchage) sans mobilier ou structures pérennes. On installe le camp en soirée, on démonte au matin, sans laisser de trace. Bien entendu, cela implique de réduire l’impact sur l’environnement au maximum. Ainsi pour la nourriture : prévoir des repas simples et légers (plats déshydratés, nouilles,semoule, barres énergétiques…) pour limiter les emballages et les restes, utiliser un réchaud portatif sécurisé (type gaz ou alcool solide) posé sur sol minéral et ne pas faire de feu de camp, rapporter TOUS ses déchets (emballages,épluchures, restes) avec des sacs hermétiques pour éviter les odeurs et ne pas nourrir les animaux. Pour sa toilette, utiliser des lingettes biodégradables ou petit gant humide avec du savon neutre ou spécial outdoor, mais loin des cours d’eau (au moins 50 à 70 m). Pour ses besoins naturels, s’éloigner des cours d’eau (70 m mini d’une source ou ruisseau), creuser un petit trou de 15 à 20cm de profondeur, à reboucher soigneusement, et ramener avec soi son papier toilette usagé dans un sac fermé. Pour l'installation du couchage, cela implique également de ne pas modifier le site : respecter la végétation, pas de tranchées, pas de cailloux déplacés, et si c'est vraiment nécessaire, par exemple pour se protéger le vent, remettre le lieu dans l'état initial avant de partir.
Le camping sauvage, en revanche, implique souvent de rester plusieurs nuits, d’installer davantage d’infrastructures durables, avec une tente plus élaborée, et des équipements plus sophistiqués et encombrants comme des tables pliantes, glacière, réchauds à gaz ou multi-fuel stable pour se nourrir, douches solaires, bassines pour se laver, matelas gonflables pour dormir. Cela nécessite donc souvent le besoin d’amener son matériel avec un véhicule : vélo, moto ou voiture, et de camper à proximité d’une route ou d’un accès motorisé.
Sur le plan juridique, les textes comme le décret n°2015-1783 du 28 décembre 2015 précisent les dispositions du Code de l’urbanisme en matière de camping sauvage et d’occupation des sols. Toutefois,les règles exactes varient fortement selon les communes, les parcs nationaux,les zones protégées, et les arrêtés locaux.
Ainsi, dire « le bivouac est légal » partout serait trop simpliste : il est autorisé là où il n’est pas interdit, sous réserve de respecter les contraintes locales.
Principes généraux et interdictions communes
Pour savoir où poser votre tente, voici quelques principes et interdictions généralement applicables à travers la France :
- Il est interdit de camper dans les zones urbaines, sur les voies publiques, ainsi que dans les parcs municipaux, sauf autorisation expresse.
- Le bivouac est interdit dans les zones urbaines, sauf autorisation spécifique donnée par la mairie ou le gestionnaire du terrain (événement sportif, festival, randonnée organisée). Il est, de façon générale, toléré dans les espaces naturels hors zones urbaines là où il n’est pas expressément interdit.
- Il est généralement interdit de bivouaquer à moins de 200 mètres d’un captage d’eau potable, pour éviter toute contamination.
- Le bivouac est souvent interdit dans les sites classés ou inscrits, les zones de protection de la nature, les réserves naturelles ou les zones patrimoniales.
- On retrouve fréquemment des interdictions à moins de 500 mètres d’un monument historique ou d’un site classé.
- Le feu de camp est dans la majorité des cas interdit, notamment en période de sécheresse ou dans les zones sensibles. Les parcs exigent l’usage de réchauds uniquement.
- Certains parcs ou communes imposent des horaires : installation après le soir (vers 19h ou 20h), démontage avant le matin (vers 9h).
- Il faut souvent être éloigné d’au moins une heure de marche des limites du parc, des routes ou des accès motorisés, pour prouver que vous êtes en itinérance et non en camping routier.
- Certains parcs interdisent absolument le bivouac : parmi les plus connus, le Parc national des Calanques ou Port-Cros.
Ces principes forment une base de vigilance. Mais ce qui est autorisé dans un parc peut être interdit dans un autre, selon les arrêtés locaux. D’où l’importance de consulter les sites web officiels ou les offices de tourisme avant d’aller bivouaquer.
Cas particuliers : les parcs nationaux et zones protégées
Les parcs nationaux français sont particulièrement exigeants. La réglementation est souvent plus stricte dans le cœur du parc,tandis que l’aire d’adhésion (zone périphérique constituée de communes qui ont choisi volontairement d’adhérer à la charte du parc) peut offrir plus de souplesse.
Voici quelques exemples typiques à retenir :
- Parc national des Écrins : le bivouac est autorisé entre 19h et 9h, dans une tente légère (ne permettant pas la station debout), et à plus d’une heure de marche des accès routiers ou des limites du parc.
https://www.ecrins-parcnational.fr/bivouac
- Parc national du Mercantour : mêmes contraintes temporelles (19h–9h), distance minimale d’une heure de marche, usage exclusif de tentes légères, interdiction des feux.
https://www.mercantour-parcnational.fr/fr/le-parc-national-du-mercantour/la-reglementation
- Parc national des Pyrénées : le bivouac est autorisé de 19h à 9h, à condition de s’éloigner d’ au moins une heure de marche de toute route ou limite du parc.
- Parc national des Cévennes : la pratique est permise sous conditions sur ou à proximité des itinéraires balisés (GR / GRP), sur une bande restreinte (souvent 50 mètres de part et d’autre du sentier), pour une seule nuit, de 19h à 9h, et avec des tentes légères. Certaines portions sont toutefois interdites.
- Parc national de la Vanoise : le camping est strictement interdit, mais un bivouac restreint est toléré uniquement dans les aires dédiées aux refuges en période de gardiennage, avec des rétributions possibles.
Notez que les règlements des parcs évoluent : il est essentiel de vérifier les documents officiels du parc concerné juste avant votre départ.
Espaces naturels régionaux, réserves et zones moins protégées
En dehors des parcs nationaux, vous trouverez des parcs naturels régionaux, des réserves naturelles, des zones forestières, des terrains intercommunaux ou privés. Là aussi, les règles varient fortement selon la gestion locale :
- Dans de nombreux parcs naturels régionaux, le bivouac est toléré, souvent avec des conditions plus souples que dans les parcs nationaux. Mais certains secteurs peuvent être soumis à des interdictions ponctuelles (réglementations estivales, incendie, affluence touristique).
- Dans certaines réserves naturelles, le bivouac peut être interdit ou limité à des zones définies. Il est impératif de consulter les arrêtés préfectoraux ou les règlements spécifiques.
- Sur des terrains privés, le bivouac est possible avec l’accord explicite du propriétaire. Cela reste la solution la plus sûre dans des zones peu réglementées.
- En zone non protégée, à condition qu’aucun arrêté municipal ne l’interdise, le bivouac peut être toléré selon les principes généraux (respect de l’environnement, horaires raisonnables).
Un bon réflexe : avant chaque sortie, consultez le site de la mairie, les arrêtés municipaux ou préfectoraux, ou encore les offices de tourisme locaux, pour savoir si un secteur est ouvert ou fermé au bivouac ce jour-là.
Conseils pratiques pour bivouaquer en toute légalité et respect
Pour maximiser vos chances de bivouaquer légalement et sans encombre, voici quelques recommandations issues de l’expérience :
- Préparez votre itinéraire à l’avance : identifiez les zones protégées, les parcs nationaux traversés, et recherchez les arrêtés locaux.
- Arrivez tard (vers la tombée de la nuit) et repartez tôt le matin : ne vous installez pas en plein jour, et démontez avant que le jour ne se lève.
- Restez discret : choisissez des emplacements isolés, un peu en retrait du chemin, évitez les lisières très visibles, les clairières trop ouvertes, ou les abords de villages.
- Utilisez une tente légère, de faible emprise, et évitez les modèles dans lesquels on peut se tenir debout. Cela correspond souvent aux prescriptions des parcs.
- Évitez le feu sauf autorisation claire, et préférez les réchauds portatifs. En été, dans les zones sèches, l’usage du feu est fréquemment proscrit.
- Soyez flexible : si vous découvrez sur place une signalisation d’interdiction, partez sans discuter.
- En zone de parc national : respectez les distances minimales d’accès (horaires, éloignement d’une heure de marche) et consultez le règlement spécifique du parc en question.
- Si vous avez l’option, sollicitez les mairies ou propriétaires pour obtenir une autorisation préalable, notamment en zones moins documentées.
En résumé, la législation concernant l’autorisation ou non de bivouac est complexe et diverse. Pour profiter de nuits inoubliables sous les étoiles, en nature, tout en restant dans la légalité et le respect du milieu naturel, cela impose :
- De comprendre la distinction bivouac / camping sauvage, et de respecter l’esprit minimaliste du bivouac.
- De connaître les principes généraux (distances, horaires, interdit, respect de l’environnement).
- De consulter les règlements locaux, les arrêtés municipaux ou ceux des parcs traversés.
- D’être discret, léger, autonome et respectueux.
- De rester flexible et prêt à changer de plan si le lieu choisi est interdit.